Une nouvelle étude tente d’expliqer le petit âge glaciaire par la disparition de la population native des Amériques

Claire Deschamps / January 11 2024

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Une nouvelle étude réalisée par les chercheurs de l’University Collège London et par l’Université de Leeds affirme que le changement climatique connu comme « le petit âge glaciaire » résulte de l’extinction de la population native des Amériques. Le changement climatique connu comme le petit âge glaciaire peut-il vraiment être lié à l’arrivée des Européens dans les Amériques ?

Une nouvelle étude tente d’expliquer le petit âge glaciaire par l’arrivée des Européens dans les Amériques

Le « petit âge de glace » ou le « petit âge glaciaire » sont des expressions introduites par les scientifiques. Elles sont utilisées comme des appellations d’une période précise de l’histoire. Elle s’étale du début du 14e à la fin du 19e siècle.

La période tire son nom du fait qu’elle se caractérise par des températures moyennes plus basses que celles mesurées dans la période suivante et dans la période précédente. Le petit âge glaciaire s’installe, en effet, après une période connue comme un « optimum climatique médiéval ». C’est une période chaude qui a duré entre le 10e et le 14e siècle. Cette dernière période est souvent comparée à celle que nous vivons aujourd’hui. Ses températures sont rapprochées de celles qui caractérisent la période moderne. On l’évoque aussi dans le débat sur le réchauffement climatique, notamment pour souligner que la hausse générale des températures qu’on connaît aujourd’hui n’est pas sans précédent historique.

Par opposition, le petit âge glaciaire correspond à une période de températures plus basses. Elle coïncide aussi avec des hivers plus longs. Les recherches modernes établissent que cette chute des températures a concerné notamment les régions de l’Europe et de l’Amérique du Nord.

Les explications possibles du petit âge glaciaire

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Plusieurs études ont été menées sur le petit âge glaciaire. Elles tentent d’expliquer son apparition et les phénomènes qui auraient pu causer une baisse considérable des températures. Le petit âge glaciaire a donné lieu à l’établissement de théories parallèles qui proposent chacune des hypothèses variées pour son existence. Voici un petit aperçu des  théories les plus populaires.

Selon une théorie, le petit âge glaciaire pourrait être lié aux cycles de l’orbite terrestre autour du Soleil. Ceux-ci auraient provoqué un refroidissement observé dans l’hémisphère du Nord, y compris celui pendant le petit âge glaciaire.

D’autres théories ont tendance à expliquer le refroidissement à l’époque du petit âge glaciaire par l’activité volcanique. Ces théories se fondent sur le fait que les aérosols causés par l’explosion de certains volcans pourraient diminuer l’effet des rayons du soleil sur la surface de la Terre. Ils pourraient, de ce fait, avoir causé la chute des températures.

Une troisième théorie avance la possibilité d’une explication liée à la diminution de l’activité solaire. Selon elle, la baisse des températures pendant le petit âge glaciaire serait à mettre en relation avec une période d’activité solaire plus faible.

Enfin, la théorie la plus récente, que nous avons annoncée au début de ce texte, avance une autre possibilité. Elle indique notamment l’existence d’une relation entre la chute des températures et la disparition de la population native américaine à la suite de l’arrivée des Européens sur les continents américains.

Ci-dessous, quelques détails de plus sur cette nouvelle théorie.

L’arrivée des Européens avancée comme une explication possible pour le petit âge glaciaire

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Comme on le sait, l’arrivée des Européens dans les Amériques est associée au nom de Christophe Colomb. Explorateur marin célèbre, Christophe Colomb est né sur le territoire de la république de Gênes en 1451. Travaillant au service des monarques espagnols de l’époque, Isabelle de Castille et Ferdinand D’Aragon, Colomb est associé à la découverte des Amériques.

L’arrivée de Christophe Colombe en Amérique, en 1492, marque la découverte, pour les habitants du continent européen, des territoires américains. Cette arrivée est un moment de grand changement non seulement pour les Européens mais aussi pour les peuples indigènes. Selon les chercheurs modernes, avant 1492, les régions découverte par les Européens avaient une population de plus de 60 millions d’habitants. Une centaine d’années plus tard, vers 1600, la taille de cette population est estimée à 6 millions d’habitants seulement.

La nouvelle recherche entend associer la diminution drastique de cette population indigène avec le phénomène de la chute des températures durant le petit âge glaciaire. Pour cela, elle souligne que le contact avec les Européens a eu plusieurs conséquences catastrophiques pour la population native des Amériques.

Le contact avec les Européens n’a pas uniquement confronté les peuples indigènes des Amériques aux nouvelles technologies de guerre. Il a certes causé énormément de victimes à la suite des conflits entre les Européens et les peuples indigènes. Mais, en même temps, il a aussi introduit plusieurs types de maladies qui étaient alors inconnues sur les nouveaux continents. Les peuples natifs des Amériques n’avaient pas d’immunité naturelle contre ce type de maladies. En conséquence, une grande partie de cette population a disparu par la suite d’une contamination avec des virus mortels.

La relation entre la disparition des peuples indigènes des Amériques et le petit âge glaciaire

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Les chercheurs menant cette nouvelle étude ont découvert qu’une des conséquences de la disparition rapide de cette population a été l’abandon de terrains agricoles qui était jusqu’alors cultivés. Selon eux, la végétation qui est alors apparue à la place de ces terrains agricoles a commencé à se développer rapidement. En conséquence, elle a absorbé plus de dioxyde de carbone en le retenant dans le sol.

Selon leurs hypothèses, ce développement rapide de la végétation à très grande échelle a eu pour effet de retenir une bonne partie des gazes à effet de serre. Ainsi, ce développement pourrait être lié, selon cette étude, à une chute globale des températures. Les chercheurs estiment cette chute à 0,15 °C.

Les calculs des chercheurs qui mènent à penser qu’il existe une relation entre le petit âge glaciaire et la disparition des peuples natifs des Amériques

D’une manière générale, les scientifiques considèrent la révolution industrielle comme la période de l’apparition de changement climatique résultant de l’action humaine. Cette nouvelle étude pourrait donc montrer que les actions humaines auraient pu avoir un effet sur le changement climatique bien avant la période de la révolution industrielle au XIXe siècle. En prenant comme point de départ l’année de l’arrivée de Christophe Colomb sur le continent américain, on pourrait estimer que ces effets sur le climat ont commencé 250 ans plutôt.

Alexander Koch, un des scientifiques en tête de l’étude estime : « Les hommes ont eu un effet sur le climat déjà avant le début de la période où l’on brûlait des combustibles fossiles ». Il ajoute encore : « les combustibles fossiles n’ont fait qu’ajouter aux effets précédents ».

L’étude complète des données sur le nombre de personnes indigènes qui ont disparu à la suite de l’arrivée des Européens

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Cela fait des années que les experts ont essayé de trouver le nombre exact de personnes devenues victimes de l’arrivée des Européens dans les Amériques. La difficulté majeure dans leurs recherches est causée par le fait qu’il n’existe pas des données précises sur la taille de la population indigène avant la fin du XVe siècle.

Pour trouver des chiffres approximatifs correspondant aux victimes dans la population indigène, les chercheurs ont travaillé en combinant plusieurs facteurs. Un indice sont les récits des témoins européens arrivé dans les Amériques. Un autre, ce sont les données disponibles sur les paiements dus aux gouvernements coloniaux.

Cela étant dit, les renseignements disponibles dans ses sources ne sont pas toujours certains. D’une manière générale, le premier type de source tendent à donner des chiffres exagérés de la population indigène. Cela s’explique par le fait que les premiers colonisateurs voulaient présenter les richesses des nouveaux territoires d’une manière plus flatteuse. Le deuxième type de source reflète un système de paiement au gouvernement colonial. Mais, comme le soulignent les chercheurs, celui-ci n’a pas été établi tout de suite sur place. Il faut notamment tenir compte du fait que les données reflétées dans les registres des gouvernements coloniaux datent d’une période à laquelle les épidémies auraient déjà pu prendre beaucoup de victimes.

L’approche adoptée par la nouvelle étude pour calculer la taille de la population indigène

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La nouvelle étude adopte une méthode de recherche différente. Les chercheurs ont notamment divisé l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud en 119 régions. Ils ont ensuite étudié en détail toutes les estimations publiées sur les populations de chacune de ses régions de la période avant l’arrivée de Christophe Colomb. Grâce à cette méthode, ils ont pu calculer que les deux continents avaient une population d’environ 60,5 millions d’habitants à la période avant le premier contact avec les Européens.

Après avoir établi ses données, les chercheurs ont donc pu arriver à leurs conclusions. Selon eux, entre 1492 et 1600, 90 % de la population indigène sur les continents américains sont disparus. Cela signifie qu’environ 55 millions de personnes ont perdu leurs vies pour des raisons liées à l’arrivée des Européens sur les deux continents. Les causes de cette disparition comprennent, mais ne se limitent pas, à la violence des conflits armés. Car, comme nous l’avons dit, une bonne partie de la population est disparue en raison des suites de maladies comme la variole, la rougeole et la grippe.

Ces nouveaux résultats indiquent que le nombre de personnes mortes à cette période peut être estimé à environ 10 % de l’ensemble de la population de la terre à ce moment de l’histoire. Pour s’en faire une idée plus précise, il faudrait s’imaginer la disparition de l’ensemble de la population de la ville de New York, de Londres, de Paris, de Tokyo, et de Beijing à la fois.

L’effet de la disparition de la population indigène des Amériques sur le petit âge glaciaire

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La disparition d’un si grand nombre de personnes n’a pas été sans conséquences pour la nature. En prenant les données déjà établies, les chercheurs ont continué leur développement. Ils annoncent en effet des hypothèses intéressantes relatives au nombre de personnes et au petit âge glaciaire.

Les chercheurs ont calculé que les populations indigènes auraient pu cultiver environ 62 millions d’hectares de terres agricoles avant d’entrer en contact avec les Européens. Selon la recherche, la disparition de la population qui cultivait ces terres signifie aussi qu’une bonne partie de ces terrains agricoles sont restés non cultivés par la suite. A la suite de la disparition, le nombre de terres agricoles cultivées a été réduit de 90 %. Le chiffre qui correspond à ce pourcentage est de 6 millions d’hectares de terrain agricole cultivés vers l’année 1600.

Sur les terrains restés non cultivés, des plantes et des arbres se sont développées naturellement. Ceux-ci ont commencé à absorber plus de dioxyde de carbone de l’atmosphère.

Le dioxyde de carbone a la capacité de retenir la chaleur dans l’atmosphère de la terre. Mais les plantes et les arbres, d’autre côté, ont la capacité d’absorber ce type de gazes dans le cadre de la photosynthèse. Pour cette raison, l’explosion de la végétation sur les terrains des continents de l’Amérique du Nord et de Sud aurait pu avoir pour conséquence la chute des niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère de la terre.

Une confirmation de la théorie vient des « carottes de glace » de l’Antarctique

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Pour confirmer cette hypothèse, la recherche cite des informations tirées des échantillons de glace de l’Antarctique. Ces échantillons sont aussi appelés des « carottes de glace ». Ils peuvent montrer aux chercheurs des variations dans les niveaux de dioxyde de carbone dans le temps. Pour la période entre la fin des années 1500 et pour les années 1600, les échantillons en question confirment une chute dans les taux de dioxyde de carbone.

Les auteurs de l’étude affirment aussi que cette chute dans les niveaux de dioxyde de carbone suffirait pour faire baisser les températures globales sur la terre de 0,15 °C. Ainsi, selon eux, ces événements ont pu avoir une relation avec la période du petit âge glaciaire.

La théorie sur la disparition des peuples indigènes et le petit âge glaciaire n’est pas partagée par tous les scientifiques

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Tous les chercheurs n’ont cependant pas accepté les explications avancées par cette étude. Pour Joerg Schaefer de Lamont Doherty Earth Observatory du Columbia University, les auteurs de cette étude ont probablement tendance à exagérer les résultats de leurs recherches.

Selon Joerg Schaefer, cette nouvelle recherche ne donne sûrement pas une explication complète de la baisse des températures durant le petit âge glaciaire. Et, de fait, les auteurs de l’étude mentionnent que la chute des taux de dioxyde de carbone aurait pu être causée par d’autres phénomènes, de type naturel. Par exemple, il cite des irruptions volcaniques et des changements dans l’activité du soleil.

Cela étant dit, les auteurs de l’étude font la conclusion que la disparition d’environ 55 millions de personnes indigènes pour les continents américains aurait pu certainement causer la réduction des niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère de 50 %. En d’autres termes, la période du petit âge glaciaire peut être la suite de plusieurs facteurs.

L’étude ajoute, par ailleurs, des estimations sur les effets d’une reforestation massive qui pourrait se produire aujourd’hui. Selon les auteurs de l’étude, les effets d’une telle reforestation en ce moment ne seraient pas les mêmes que ceux qu’ils ont étudié pour le petit âge glaciaire. Ils concluent ainsi qu’une reforestation massive aujourd’hui n’aura pas des effets aussi catastrophiques que ceux dans le passé. Selon les chercheurs, elle ne pourrait notamment pas stopper un réchauffement global de la terre. Car, d’après leurs estimations, la chute dans les niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère, qui s’est produit vers 1600, ne représenterait que trois ans démission dus à l’utilisation de combustibles fossiles. petit âge glaciaire reforestation etude

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